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Prévention au travail : et si l'approche par genre était la solution ?

17/06/2020 Expertise

Les femmes seraient-elles plus exposées aux risques professionnels que les hommes ? Les mesures de prévention seraient-elles insuffisantes pour elles ? Les statistiques des accidents et maladies liés au travail comme les analyses par genre le confirment.

Article mis à jour le 17 juin 2020

L’Agence nationale pour les conditions de travail (Anact) a constaté que la baisse globale des accidents du travail depuis 2001 masque leur progression chez les femmes. Son étude(1) sur 16 ans montre que leur nombre a augmenté de 30,5% chez les femmes, tandis qu’il diminuait de 15,1 % chez les hommes. Les maladies professionnelles (essentiellement les troubles muscolo-squelettiques TMS) se sont, elles, accrues de 101,3 % en moyenne entre 2001 et 2016, mais plus encore chez les femmes - de 145,2 % - que chez les hommes - de 71,5 %. Même les accidents de trajet domicile-travail des femmes sont en hausse de 18,6 % pendant cette période, contre une baisse de 13,3% pour les hommes.

Comment expliquer de tels écarts ? Par la répartition sexuée des secteurs, des métiers ou des activités, explique l’Anact : hommes et femmes ont souvent des conditions de travail différentes, avec des risques et des pénibilités différents, dont les répercussions sur la santé sont également distinctes. Or l’exposition des femmes est sous-évaluée dans certains emplois, métiers ou secteurs : services à la personne, santé, commerce… Leurs risques sont d’autant moins pris en compte qu’ils sont ignorés comme tels.

La preuve par l’exemple

Les femmes sont, par exemple, majoritaires dans les emplois à domicile auprès des personnes âgées, dont la pénibilité physique et les risques ne sont pas ou peu pris en compte : nombreux trajets et aléas, tâches répétitives, stress psychologique, horaires atypiques, précarité, charges mentales, peu de perspectives d’évolution…

Autre exemple pris dans l’industrie cette fois : les ouvriers travaillent sur des machines automatisées quand les ouvrières sont affectées à des postes de finitions qui les exposent davantage aux troubles musculo-squelettiques. Lorsque les risques sont connus, ils ne sont pas toujours évalués pour les femmes.

Une étude a ainsi récemment confirmé leur risque accru de cancers du sein, de la peau et gastro-intestinal à cause du travail de nuit(2). Une protection spécifique de leur santé s’impose. Enfin, les femmes doivent faire face à davantage de difficultés dans leur parcours professionnel et de contraintes pour concilier travail et vie de famille. Près d’une femme sur 4 est en situation de stress au travail, ce qui est le cas de près d’un homme sur 5.

La prévention par genre, une exigence légale

L’égalité professionnelle dans la santé et la sécurité au travail est pourtant dictée par la loi « pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes » du 4 août 2014. L’évaluation des risques doit tenir compte des impacts des expositions sur chaque sexe. Elle pourrait toutefois défavoriser les femmes sur le marché du travail, en opposant leur nature à une organisation ou à ses conséquences sur la vie privée, ou encore à la pénibilité d’un poste.

La mixité exige au contraire de faire évoluer organisation et conditions de travail(3). C’est pourquoi le réseau Anact-Aract propose son « diagnostic genre » aux entreprises : cette méthode analyse les inégalités sur le plan de la santé, en même temps que celles en matière de rémunération et de carrière. L’Anact prône également une approche générale de la santé au travail par le genre. Une approche bienvenue qui devrait permettre de réduire l'écart homme-femme.

Sources :

1. Anact - Photographie statistique des accidents de travail, des accidents de trajet, et des maladies professionnelles en France selon le sexe entre 2001 et 2016. Novembre 2018
2. American Association for Cancer Research - Janvier 2018
3. Perspectives interdisciplinaires sur le travail et la santé - Février 2016 - Florence Chappert et Laurence Théry

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